Lui, c’est Pierre Passot
» Il faut dominer dans le présent, le futur et le passé. » C’est par cette logique que les vainqueurs aiment écrire l’histoire pour leurs intérêts. Celle des Comores est écrite par les français pour l’intérêt de la France.
Paraît-il, selon l’histoire française et officielle des Comores, que Passot est l’homme-clé de la présence française à Mayotte en particulier et dans les quatre îles des Comores en général.
Cette histoire officielle nous apprend aussi que son grand rêve inachevé était d’établir la souveraineté française sur les autres îles des Comores.
La question qu’on peut se poser, vis-à-vis de ce rêve, pourquoi les protoctorats sur les autres îles n’ont été effectifs que quarante ans après ?
Un début de réponse sur cette question se trouve sur le comment Mr P. Passot a foulé le sol Mahorais pour la première fois tel que Cadi Omar Aboubakar le rapporte dans sa chronique arabe Mahoraise écrite en 1865 :
» M. Passot débarqua à Mayotte en provenance de Nosy-Bé. Il était porteur d’un message, envoyé à Andrianantsouly par sa nièce Tsi’oumekou. Elle lui demandait son avis sur la cession de son île au sultan de France Louis-Phillipe. Andrianantsouly se fit lire la lettre par le Cadi Omar. Il approuva totalement la cession de l’île de Nosy-Bé au sultan de France. Et avant le départ [du capitaine de corvette] pour l’île de Bourbon, il lui dit : « M. Passot, maintenant que nous sommes devenus des alliés, j’ai un service à vous demander ; je désire que le commandant de Bourbon m’envoie de matériel de guerre : [de la poudre] du plomb et de tout petits canons, car j’ai besoin d’assurer ici ma sécurité. J’ai, en effet, de nombreux ennemis à Mayotte, à Anjouan et à Moheli…
M. Passot lui demanda de formuler sa requête par écrit. [Alors] Andrianantsouly ordonna à Cadi Omar Aboubakar de rédiger le lettre [destinée] au colonel de Bourbon. Le Cadi, qui était maintenant au courant du dessein secret d’Andrianantsouly, rentre chez lui et décida de modifier le contenu du message adressé au colonel du Bourbon. Il écrivit ceci : « Nous offrons l’île de Mayotte à Louis-Phillipe, sultan de France, et ceci, de notre plein gré. Andrianantsouly y sera son représentant et le Cadi Omar son juge. Envoyez nous du matériel de guerre, de la poudre, du plomb et des petits canons. » Puis, il cacheta la lettre et la remit à M. Passot. »
On comprend que d’après ce texte, l’homme qui a rendu possible la présence de la France à Mayotte ce n’est pas M. Passot c’est plutôt Cadi Omar Aboubakar avec son stratagème contre le projet secret pour le pouvoir d’Andrianantsouly.
L’histoire française et officielle de l’archipel des Comores aime présenter ce rôle majeur du Cadi comme une exagération. En le remplaçant sans hésitation par un pire mensonge, sorti de leur poche, comme quoi lors du premier passage de Passot dans l’île : Passot était « ébloui par la beauté de l’île et constate que la rade de Dzaoudzi constitue un formidable port naturel. Andrianantsouly, menacé par la rébellion d’Andriannavi, se déclare prêt à vendre à la France un royaume qu’il n’est pas sûr de conserver par les armes. «
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Crédit photo : portrait du commandant Passot en 1850, dessin du 19e siècle, faisons de l’histoire à Mayotte.
Sources : Histoire des îles, Djahazi 2, G. Cidey Casimir, éditions Djahazi, 1997. Agenda historique de Mayotte 2003.
